Les brumes se lévent pour Cayus

Vous ne vous êtes pas égaré mais ne vous en faites pas, vous aurez tout le temps pour cela.

Sourire.

Bonjour Cayus...
Ainsi vous êtes prêt à me suivre? Et bien suivez moi dans ce cas...

Sans plus de discours, elle fit demi-tour et repartit vers l'endroit d'où elle venait. Elle n'en eut pas pour longtemps à le mener jusqu'à la clairière, cet endroit précis, juste à l'orée du bois, qu'elle avait érigé en seuil pour tout être parvenant ici pour la première fois... Un pas de côté, comme le voulait sa tradition, pour le laisser face à face avec sa sobre découverte. Le regard tourné vers la longère, et sa voix, presque lointaine, pour trois mots avant le silence.

Bienvenue à Etel...

Chaque fois qu'elle prononçait ces mots, elle avait l'impression de faire une promesse. Espoir en tout cas, que le nouveau venu se plairait ici et progresserait à sa guise sur les voies de la Mère. Malgré la simplicité du lieu, sa situation reculée et son caractère en apparence confiné, c'étaient de vastes horizons qui s'ouvraient aux novices, qui pourraient les mener vers terre, air, feu ou mer... vers Dagda, Diancecht, Ogma et tant d'autres... multitude de directions que nulle âme qui vive n'a jamais complètement explorées.

Etait-ce pour lui qu'elle marquait ce temps d'arrêt? Certainement, mais cela lui permettait de s'accorder une pause, structurer les impressions et sentiments en réalisations plus distanciées...
Prendre du recul... se perdre dans l'instant et dans ses souvenirs pour ne jamais oublier à quel point elle tenait à ce lieu et à ceux qui l'avaient habité.

Jamais elle n'oublierait. Ce moment où ils étaient arrivés, de nuit et fourbus, découvrant cette ruine isolée qui reflétait si bien leur état, physique un peu, d'esprit surtout, qu'ils l'avaient adoptée sans même avoir eu besoin d'en parler. Les jours suivants, enthousiastes, où chacun se sentait pionnier dans ce lieu depuis si longtemps délaissé. Elle revoyait encore Morgove perché sur le toit, Lusiana revenir fièrement, accompagnée des paysans du village voisin et d'un vache laitière, pour leur annoncer qu'elle avait obtenu l'acte de propriété de ce lopin de terre oublié. Douce insouciance de ces jours qui l'avaient vue passer de danvezenn à neveziad...
Renouveau...
Printemps...

Beaucoup étaient venus ici, brèves apparitions avant de retourner d'où ils étaient venus, emportant avec eux l'espoir de rires et de moments heureux... Bonheur avorté à qui l'on refuse finalement sa chance pour aller le quérir ailleurs. C'était aussi le droit de chacun... Un cycle, des pas qui prennent un chemin plutôt qu'un autre et qu'on espère recroiser un jour.
D'autres, plus rares, allaient et venaient sans que nul ne puisse prédire leurs mouvements ou intentions, ni influer sur leurs décisions. Si différentes l'une de l'autre et pourtant...semblables en ce qu'elles semblaient créatures d'un Autre Monde...

Il fallait lui faire comprendre... lui dire...
Tournant la tête vers Cayus, elle lui dit donc:

Prenez la peine de découvrir les lieux qui vous sont accessibles, d'en tirer ce que vous pouvez, et vous serez surpris de voir à quel point Etel peut se révéler vaste...

Un sentier de forêt, un murmure lointain et soudain, au détour du chemin, bien qu'invisible une seconde plus tôt, c'est l'océan que l'on rencontre. Cela ne nécessite qu'une chose... avancer... marcher, courir, bondir ou danser, mais avancer. Et cela messire, aucun de ceux que vous rencontrerez ici ne pourra le faire à votre place.

Silence à nouveau, puis sourire presque confus en frottant ses mains gantées l'une contre l'autre.

Je parle trop. Venez donc vous réchauffer. Peut-être une bonne âme aura-t-elle mis de l'eau à chauffer ou, si nous sommes chanceux, débouché quelque bouteille de la cave.

Quelques pas plus tard, elle poussait la porte de la longère en s'écartant pour le laisser entrer devant elle.

A peine avait il vu un sourire et fini de prononcer ses mots, que son amie fit de suite demi-tour pour remonter le chemin par lequel elle arriva. Étonnamment il n'avait pas vu cette petite piste qui menait à Etel. Comme si elle n'existait pas pour lui, avant cet instant là.

Au bout de celle-ci, il vit Chimera faire un pas de côté, comme une bribe de danse et sous ses yeux, un large et grand espace qui résonna à son cœur et déclencha en lui une multitude de réactions. Les yeux écarquillés, il sentait tout son corps battre tel un tambour. La moindre de ses veines lui frappait sous la peau. Comme si un instant, tout un flot d'énergie envahissait son corps. Les couleurs furent plus vives et scintillaient sous un soleil lumineux par mille et un rayon. Les feuilles de tout les arbres qui étaient en bordure, étaient d'un vert presque luminescent. Les herbes bougaient comme toutes liées par une même danse.

Il entendit ces mots: "Bienvenue à Etel.", il regarda la personne qui parlait comme si c'était la première fois qu'il là voyait et rejeta un œil à la clairière qui étonnamment, était redevenu comme une autre clairière.
Regardant à nouveau Chimera, qu'il commençait à peine à reconnaitre, il ne sut quoi penser. Il cru tout d'abord que ce ne fut qu'une dérive de sa propre pensé, qu'il n'avait vue qu'une illusion causé par sa trop grande envie d'entrée en ce lieu.
Mais il sentait autre chose plus indéfinissable, il sentait qu'il avait perçu autre chose qui le transcendait. Mais quoi ou qui ou bien quelle force ?

Au moment où son esprit se posait cette question Chimera lui annonça:

Prenez la peine de découvrir les lieux qui vous sont accessibles, d'en tirer ce que vous pouvez, et vous serez surpris de voir à quel point Etel peut se révéler vaste...

Il eut un bref sourire et savait que ces mots lui indiquait en fait qu'il n'avait pas eut d'hallucinations, mais qu'il n'avait vue qu'un côté de ce lieu. Il n'en dit mot, ses sensations ne pouvaient être expliquer. De la suite il ne compris que quelques mots:réchauffer, chanceux, bouteille...

En voyant Chimera le laisser rentrer en premier, il retrouva sa langue:
"Trugarez, je n'ai pas l'habitude de rentrer après une dame, mais à situation exceptionnelle manière exceptionnelle."
Il entra.

La salle était grande et d'aspect assez classique pour une bâtisse en campagne (ou peut être son imagination se faisait une idée bien plus imposantes du lieu). Une cheminée, devant laquelle de gros fauteuils trônaient, s'imposait comme élément incontournable de la pièce. Les côtés de l'antre disposaient de niches où divers ustensiles étaient entreposés (pince à bois, pelle , chaudron...).
Au premier coup d'œil, personne n'était dans la pièce, il s'avança timidement...

Il se dirigea vers les fauteuils et vit que le feu n'était pas allumer depuis longtemps. Il se demanda si quelqu'un d'autre était présent dans la bâtisse mais conclu ça penser par la présence de Chimera avant son arrivé.

Il s'installa dans un des fauteuils et se mit à dire.

"Dame Chimera votre feu me fait du bien. Je ne m'apercevais pas du froid que je portais sur moi dans ma marche."

Il rapprocha ses mains de l'antre et dit:
"J'ai une chose à vous montrer. Car mon petit fluto n'est pas la seule chose que j'ai emporté en ce lieu."

Il mit sa main dans une de ses poches et en sorti une petite pierre.



"Je l'ai trouvé dans un bout de tissus lors de mon aménagement à Felger. Je n'en ai jamais parlé jusqu'ici et l'avait oublié dans un tiroir de chez moi. Alors avant de venir ici je me suis rappeler de cette petite pierre.

Se qui m'a frappé c'est la petitesse des gravures. Je me suis dit qu'un graveur classique ne pouvait avoir réalisé cette chose, que ce devait être l'œuvre d'un spécialiste ou autre chose. Je vois qu'il s'agit de runes mais je ne comprend pas cette écriture. Savez vous la déchiffrer ?"

Elle le laissait aller tranquillement à ses pensées et à la découverte du lieu. C'était chose sacrée que ces premiers instants.

Vous êtes le bienvenu près de ce feu quand vous le souhaitez, Cayus. Je le considère comme le centre névralgique d'Etel, presque tout autant que le Cromlec'h ou nous nous réunissons et le cercle où se déroulent les cérémonies... et ce surtout en hiver comme aujourd'hui!

Regard curieux lorsqu'il lui montra la petite pierre gravée des symboles d'Ogma. Elle tendit la main pour la récolter dans sa paume et l'examina un instant.
Limpide était la signification des gravures, mais elle fut surprise qu'une telle chose soit possible, et qu'il soit en possession de cette étrangeté.

Lors de votre aménagement à Felger dites-vous? Dans quelles conditions?
Pardonnez-moi, je vous pose des questions sans lever le mystère sur celle qui vous préoccupe.

Posant à nouveau les yeux sur la pierre, avant de relever le nez vers le fougerais:
Vous avez raison, ce sont les symboles de nos ancêtres. Cette pierre est gravée du nom de Diancecht, ce que je trouve assez surprenant... Vous dit-il quelque chose?

Il pris bien note, au sujet du Cromlec'h, que ce lieu semblait bien important et se dit qu'il irait le rechercher, juste après s'être reposer un peu.

Puis voyant l'interrogation que le petite pierre posait à Chimera il répondit comme il put à ses questions.

"Et bien je l'ai trouvé en visitant la cave de mon habitation. Toute la maison semblait avoir été habité par quelqu'un dont le superficiel n'était que peu important. Pas de trace de meuble ou de teinture, une paillasse modeste laissé dans une pièce et quelques fioles et un pilon dans la cave. En visitant cette dernière pièce, je m'aperçus qu'une portion de mur était cassé. regardant de plus prés je vis sur une brique qui était au sol était creuse et quelle abrité le bout de tissus qui envelopper cette pierre. Quant au mur il avait l'air d'avoir était violemment casser.

Diancecht, ce nom me dit vaguement quelque chose et me donne de drôles d'impressions qui ne me sont d'ailleurs pas désagréable. Que représente ce nom ?"

Cayus était stupéfait de la rapidité avec laquelle Chimera lui répondit. Ceci confirma son opinion sur elle. Elle était donc trés expérimenté et son savoir ne devait être mesurable, comme si l'on voulait mesurer la contenance de l'océan.

Si elle était ainsi dissimulée, alors elle doit avoir bien de la valeur. Je vous conseillerait d'en prendre grand soin.

Sur ces mots elle lui rendit sa pierre.
Quelques fioles et un pilon, oui, peut-être un apothicaire ou médecin. Pourquoi dissimuler un tel objet? Etait-ce le fait de l'occupant précédent? Ou d'autres encore avant lui qui avaient laissé là ce talisman qui devait rayonner au point d'éveiller chez les occupants du lieu un attrait pour le savoir des plantes?
Pourquoi le mur avait-il été brisé? Choix délibéré? Violence faite dans la demeure de quelqu'un dont on désapprouvait les pratiques? Qui d'ailleurs était ce quelqu'un?
Elle n'en saurait probablement jamais rien. Mais là n'était pas la question, et il en était une, en suspends, à laquelle Cayus attendait réponse.

Diancecht est le maître des ovates, ceux qui pratiquent la médecine traditionnelle par la science des plantes. Il est connu pour avoir lors d'une bataille creusé une fontaine. Dans cette fontaine, il avait effectué un si savant mélange des plantes de nature que tout homme blessé où mort qui s'y trouvait plongé revenait à la vie.

Il y a également une autre légende à son sujet...

Elle posa les yeux sur le feu, croisant les mains dans son dos, geste inconscient hérité de Morgove qu'elle avait vu conter ainsi quelques fois...

Nuada, un des chefs des Tuatha De Danaan, avait perdu un bras à la bataille. Cette blessure l'empêchait dorénavant de régner, car homme mutilé ne peut porter souveraineté. Un autre, Bres, avait donc pris sa place, au grand désespoir de bon nombre de ses administrés. Ainsi Diancecht créa pour Nuada un bras fait d'argent afin de lui rendre son intégrité, et de le restaurer dans ses fonctions. De nouveau souverain, Nuada retrouva son trône, désormais nommé Nuada Airgetlam, Nuada au bras d'argent.

Cependant, c'est le fils de Diancecht, Miach, qui réalisa l'exploit de greffer le bras à Nuada... Cela déchaîna la colère de son père, qui, rendu fou par la jalousie, le tua de trois coups d'épée...

Elle sourit très doucement.

Voilà... j'espère que vous cernez un peu mieux le personnage, et que cela vous aidera à percer le mystère de cette pierre...

Il écouta les explications de l'oratrice avec attention et s'étonna de la valeur qu'avait cette simple pierre. Il ne l'imaginais pas autant.

Puis il sorti sa pipe et la bourra d'une boulette de tabac, tout en écoutant la narration des histoires au sujet de Diancecht.

En effet je vois mieux le style d'être qu'il s'agissait. Scientifique des plantes mais aussi très guerrier, cela me plait beaucoup même si la démarche brutale qu'il eut avec son fils n'est pas dans mes habitudes.

Il alluma sa pipe et enleva ses bottes. Puis il mit ses pied au bord de la cheminée. Il fumait l'air pensif dans un silence méditatif.

Plusieurs ronds de fumé plus tard, il se redressa, remit ses bottes. Se leva d'un bond et s'exclama: "Je vais sortir cueillir des herbes et voir si je trouve le cromlech'. Puis cela me permettra de prendre un temps à la réflexion sur Dianceht. Serrez vous ici pour mon retour ? Je ne part que le temps d'un intervalle de son de cloché."

Cayus sorti. Il se sentait calme et serein. Il s'assied dans la clairière et respira lentement quelques minutes, tout en observant la nature. Une légère brise caressait son visage et la poésie des volatiles sifflotant se fessait agréablement ouïr aux oreilles du chevelu.

Il se leva et longea la clairière ramassant un peu de menthe sauvage. Il en mis un brin entre ses dents et pris le reste dans ses mains.

Il ouvrit la porte et revint dans la bâtisse.

"Oui la cueillette fut bonne, en effet, la menthe semble très odorante en cette saison."

Entendant le murmure de la dame, il déposa les herbes sur la table, s'approcha et écarquilla les yeux en observant l'objet et répétant certains mots qu'elle prononcé de façon machinale.

"danvezed...druides d'Etel... neveziad..."

Il tendit la main timidement et après une légère hésitation récupéra l'objet en retournant la main de la douce Chimera. Il s'inclina, un genoux à terre tout en portant le dessus de la main à son front.

"Trugarez pour tout, vraiment, Trugarez. Je tacherais d'être à la hauteur de cet honneur."

Puis se relevant, il regarda longuement, émerveillé et curieux, l'objet symbolisant ses premiers pats dans l'apprentissage druidique et dans l'aiguisement de ses sens et de sa réflexion, lui permettant un rapprochement vers la mère universelle.


Utilisant la ficelle de son veston, il enroula le symbole de façon à le laisser visible. Il se sentait fier mais en même temps savait que la route de l'apprentissage pouvait être longue. Il fut impatient dés son arrivé en ces lieux mais sa conscience lui répétait qu'il devrait faire preuve de patience et de sérieux.


"Pour commencer à appliquer mes maigres connaissances, fêtons cela avec une bonne infusion stimulante. En réalité c'est l'une des seules propriétés médicinales que je connaisse. Cette plante a d'ailleurs surement d'autres propriétés mais je doit apprendre la patience si je veux pouvoir progresser. Désolé je suis si excité par ce nouveau défi que je parle beaucoup trop."

Il chercha une casserole mais ne savait vraiment où.
Il se senti troublé. Il était en réalité tellement joyeux au fond de lui qu'il ne savait pas vraiment que faire pour se calmer.